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samedi 22 juin 2013

ALLOCUTION DU 20 JUIN 2013, A L’OCCASION DE LA JOURNÉE INTERNATIONALE DU RÉFUGIE



Mesdames, Messieurs,  chers invités,  en ce 20 juin 2013,  c’est  avec un immense plaisir que nous célébrons avec  vous, aujourd’hui , cette journée  internationale  consacrée  chaque  année, par solidarité, à tous les réfugiés du monde.  Aussi, nous  vous souhaitons honorables invités ici présents la bienvenue et vous remercions d’avoir répondu à notre invitation. Permettez-nous, à cette occasion, d’avoir une pensée pieuse pour ces millions d’individus qui vivent,  le plus souvent,  un exil forcé en dehors de leurs pays.  Un exil qui a duré, plus de 24 ans,  pour la plupart des réfugiés mauritaniens que nous sommes. C’est pour vous dire, que ce long et douloureux exil n’a pas entamé, pour autant, notre sentiment d’appartenance à notre chère patrie qu’est la Mauritanie. Si nous pouvons prétendre ou aspirer à une certaine tranquillité dans notre pays d’asile, le Sénégal, c’est bien parce qu’avec générosité la république du Sénégal a bien voulu, en coopération avec le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCNUR), nous octroyer un statut  sur son territoire et en conformité avec les lois internationales régissant le droit d’asile  et telles que contenues dans  la convention de Genève  de 1951 et du protocole de 1967. Nous vous en savons gré de nous avoir assuré une protection internationale. Aussi, nous remercions  chaleureusement les  autorités du Sénégal et le HCNUR et leurs représentants et partenaires, en l’occurrence l’Office africaine pour le développement et la coopération (OFADEC). Toutefois, nous sommes tenus de rappeler que notre aspiration profonde, à rentrer un jour  chez nous, demeure encore  ancrée dans nos cœurs. Un jour que nous espérons toujours  plus proche.  Pour preuve, nous restons toujours, pour l’essentiel,  des réfugiés apatrides qui un jour d’avril 1989 ont été victimes d’un programme d’expulsions massives  de caractère raciste et ce de la part de nos propres autorités  gouvernementales qui nous ont déniés et privés de notre citoyenneté mauritanienne. Certes, après  moult refus de reconnaitre les crimes de déportations dont nous avons été victimes et du droit de recouvrer notre citoyenneté et nos biens spoliés,  il a fallu attendre près de 19 ans , à la faveur du  coup d’état militaire  d’aout 2005 et une transition démocratique de 19 mois, pour qu’enfin  soit envisagée  une solution au lancinant problème des réfugiés mauritaniens. C’est ainsi que l’ex-président mauritanien Sidi Ould Cheikh Abdallah démocratiquement élu en avril 2007 a reconnu, entre autres, les crimes de déportations et les dénis de droits contre une catégorie de citoyens mauritaniens. Tout en exprimant sa compassion à l’endroit des victimes, il  n’en appelle pas moins à  la mobilisation des mauritaniens et aux partenaires au développement afin de rechercher les voies et moyens appropriés pour le retour des réfugiés. C’est dans ce nouveau contexte politique que seront organisées des opérations de rapatriement des réfugiés mauritaniens  qui vivaient au  Sénégal. Des opérations qui débuteront en janvier 2008.Ces rapatriements organisés sous l’égide du HCNUR s’inscrivaient dans le cadre des accords tripartites signés en novembre 2012 à Nouakchott entre l’Etat du Sénégal, de Mauritanie et le HCNUR. Il  est vrai que ces rapatriements vont continuer avec des longues périodes de perturbations dues  au coup d’état militaire survenu en aout 2008 contre le nouveau  régime démocratiquement élu. En effet, près de 20000 réfugiés mauritaniens sont rentrés au pays dans des conditions que regrettent et dénoncent, encore aujourd’hui,  beaucoup de rapatriés rentrés entre janvier 2008 et mars 2012, en raison des manquements qui caractérisent leurs réinsertions. Dénonciations qui seront relayées par les organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme. Le forum des organisations nationales des droits de l’homme  en Mauritanie (FONADH) regroupant 13 structures reconnaissaient récemment qu’il ya eu certes des avancées en matière d’insertion des rapatriés du Sénégal mais cela cache mal des situations défavorables liées notamment à la non délivrance des pièces d’états civils à bon nombre d’entre eux et à la persistance des questions liées au foncier, touchant ceux qui ont été dépossédés de leurs terres agricoles, lors de leurs expulsions en 1989.  Plus récemment,  en mars 2013, l’Union nationale des rapatriés mauritaniens du Sénégal a dénoncé la dissolution de l’agence nationale d’appui et  d’insertion des réfugiés (ANAIR) consécutive au communiqué du conseil des ministres mauritaniens du 21 mars 2013. Elle estime que cette dissolution ne se justifie pas  et qu’elle intervient alors qu’aucune  réponse n’a été apportée à la question des terres spoliées, à l’indemnisation des éleveurs, au passif humanitaire,  toutes choses relatives aux violations massives des droits de l’homme perpétrées contre les citoyens non-arabes de Mauritanie,  entre 1989 et 1991. Après tant de souffrances  endurées par les citoyens noirs mauritaniens au cours de ces dernières décennies, nous avons le sentiment que  cette tragédie tente de se répéter. En effet, un grand danger risque encore une fois de plus de mettre à mal d’avantage le précaire équilibre social fortement ébranlé lors des événements  douloureux  de 1989 susmentionnés. Il s’agit du recensement démographique en cours et visant à l’établissement d’un nouveau système d’identification en Mauritanie. Ce qui devait se présenter comme une démarche administrative et technique routinière se relève être un grand danger, en raison non seulement des manifestations violentes qu’elle a suscitées de la part des communautés noires mauritaniennes qui ont jugé ce recensement  discriminatoire à leur endroit, mais aussi des actes de répressions policières qui s’en suivirent. Permettez-nous de remercier le mouvement mauritanien Ne Touche pas à ma nationalité (TPMN) dirigé par Abdoul Birane Wane, qui s’insurge courageusement  contre ces discriminations liées aux dénis de citoyenneté, nous n’oublions  pas dans nos remerciements toutes les organisations de la Diaspora mauritanienne qui luttent pour mettre fin aux discriminations en cours dans notre pays et contre l’impunité. Nous ne saurions oublier de remercier notre cher compatriote Biram Dah Ould Abeid qui préside l’organisation de défense des droits de l’homme, Initiatitives du Mouvement de Résurgence Abolitionniste en Mauritanie (IRA) qui lutte sans compromission  et au péril de sa vie contre l’esclavage qui prévaut encore dans le pays et contre toutes les violations des droits de l’homme.
Mesdames, Messieurs, c’est conscients d’un côté des dangers récurrents  qui ne cessent de menacer l’équilibre ethnique toujours fragile de notre pays la Mauritanie,  et de l’autre du  problème de gouvernance qui y prévaut depuis le coup d’état militaire d’aout 2008 et comme en témoigne le non  renouvellement du mandat de l’assemblée nationale  qui  a pris fin depuis novembre 2011, que nous réfugiés mauritaniens au Sénégal avons décidé en connaissance de cause de sursoir à notre rapatriement, en attendant que des conditions sociopolitiques favorables surviennent dans notre pays.
Par ailleurs, nous sommes solidaires de nos concitoyens réfugiés maliens venus célébrer avec nous, cette merveilleuse journée internationale du réfugié, ici à Richard Toll et cela  dans le cadre de la  coordination que nous avons en commun. Nous rappelons que les réfugiés mauritaniens au Mali ont fait l’objet d’un recensement par le HCNUR, et nous nous en félicitons, malgré les dénégations quant à leur existence formulée à tord, par un haut représentant des autorités mauritaniennes et pas le moindre.
Pour conclure, nous attirons la communauté internationale sur les menaces qui pourraient découler de la non-résolution  définitive de la question des réfugiés de la zone sahélo-saharienne, dans ce contexte de la guerre au Mali. En effet, la présence, d’une part, de dizaines de milliers de réfugiés et déplacés  maliens touaregs  dans leur propre pays, au Niger, en Mauritanie, au Burkina Faso, en Algérie, fuyant la guerre engendrée par des forces islamistes obscurantistes et  la présence d’autre part de milliers de réfugiés mauritaniens au Sénégal et au Mali victimes des déportations en 1989,  sont des questions qui doivent trouver des solutions justes et équitables pour toutes les victimes et sans discrimination, au risque de constituer une source d’instabilité durable de la zone sahélo-saharienne.
Aussi, nous appelons la communauté internationale à œuvrer dans ce sens, afin que notre sous région retrouve la paix la sécurité indispensables pour tout développement.
Nous vous remercions pour votre attention,  et remercions  toutes les bonnes volontés qui ont contribué discrètement  à faire de cette  journée de célébration du 20 juin un succès.











                                                  Richard Toll, le 20 /06/ 2013
Source! Moustapha Touré

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