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dimanche 3 février 2013

Mauritanie : Ibrahima Sarr et Ould Boulkheir rattrapés par l’histoire

A quelques jours de la marche pour la justice le 9 février prochain dans la capitale mauritanienne, le président de l’AJD-MR est dans le collimateur des militants et sympathisants anti-esclavagistes proches de l’IRA.

Ces derniers lui reprochent d’avoir proposé à Ould Boulkheir premier vice président de l’APP à l’époque une amnistie à Ould Taya contre l’abandon du pouvoir. Il a fait cette déclaration lors de son voyage en Belgique en 2004 dans une cassette audio que ses détracteurs ont diffusé sur les réseaux sociaux cette semaine.

Cette pièce à conviction trouble l’opinion publique et les observateurs qui s’interrogent sur le bien fondé de la démarche de l’ancien prisonnier de Oualata qui consiste à relancer l’abrogation de la loi d’amnistie de 93 aux forces de sécurité ayant commis des crimes entre 89 et 92.

Les faits sont têtus. Entre 1989 et 1992 plus de 400 négro mauritaniens ont été tués par les forces régulières ou les milices pro gouvernementales du régime de Ould Taya. Parmi les victimes de paisibles ressortissants de Sorimalé et environnants enterrés dans des fosses communes lors des évènements de 89 et 28 soldats négro mauritaniens exécutés extrajudiciairement à Inal à la veille de l’anniversaire de l’indépendance de la Mauritanie en 90.

Dans sa campagne en 93 Amnesty International avait signalé plus de 300 prisonniers mauritaniens qui ont connu le même sort en 90 au lendemain d’une tentative présumée de coup d’Etat en 90. Tous ces crimes restés jusqu’ici impunis indignent les défenseurs des droits de l’homme et les partis politiques mauritaniens dont l’AJD-MR .

Et son président fait l’objet depuis plus d’une semaine de vives critiques de militants et sympathisants anti-esclavagistes proches de l’IRA qui sont revenus sur les déclarations passées de Ibrahima Sarr à l’époque deuxième vice président de l’APP et qui avait proposé à Ould Boulkheir premier vice président du parti une amnistie à Ould Taya moyennant qu’il abandonne le pouvoir. L'objectif visé était de sortir le pays du chaos.

Ce double langage ou monnaie d’échange n’a pas échappé à ses détracteurs qui ont diffusé cette semaine une cassette audio sur les réseaux sociaux reproduisant ces déclarations lors de sa rencontre en 2004 avec la diaspora mauritanienne en Belgique.

Huit années après les faits le président de l’AJD-MR en a fait l’amère expérience en initiant une marche pour la justice le 9 février prochain à Nouakchott. En effet si on se réfère au contexte l’amnistie de Ould Taya est en contradiction avec l’abrogation de la loi d’amnistie de 93 dont l’ancien président est le principal responsable.

Ainsi Ibrahima Sarr et Ould Boulkheir sont rattrapés par l’histoire et par la réalité en ce sens que ce projet politique absurde ne tenait pas compte de l’intérêt général des mauritaniens et peut être assimilé à un marchandage politique et qu’en aucun cas cette sortie honorable de Ould Taya ne pouvait résoudre le passif humanitaire encore moins mettre en ouvre les plaintes des veuves et orphelins des soldats négro mauritaniens.

Rien ne justifiait cela hier et encore plus aujourd’hui sur le dos principalement des victimes .Et malheureusement les coups d’Etat n’ont pas arrangé la situation politique. Au contraire ces dictatures militaires ont replongé le pays dans un Etat de non droit où l’impunité est érigée en règle de gouvernance.

Les observateurs s’interrogent sur le mutisme de l’opposition à l’époque ou du moins la passivité des deux principaux partis le RFD de Ould Daddah et l’UFP de Ould Maouloud qui n’ont pas su traduire dans les faits cette revendication légitime de la communauté négro mauritanienne.

L’amnistie de 93 aux forces de sécurité de Ould Taya est sans aucun doute le principal obstacle à la réconciliation nationale et à la cohabitation des différentes communautés de la Mauritanie. Les critiques ont au moins le mérite de soulever cette question nationale.

Sur un autre registre le débat sur cette pièce à conviction a tout l’air d’une campagne de dénigrement en partie et par ricochet contre le président actuel de l’APP Ould Boulkheir qui devra continuer à faire face à ses dissidents du parti Moustaqbel qui ne l’ont jamais pardonné d’avoir renié les fondamentaux d’El Hor. Ou une campagne de diversion au moment où le trublion Ibrahima Sarr s’attaque à des crimes sans châtiments dont les responsables ne sont toujours pas inquiétés par la justice. Secret de Polichinelle.

L’IRA n’apprécie guère le manque de conviction du président de l’AJD-MR sur l’esclavage. En définitive l’abrogation de la loi 93 venant de l’ancien prisonnier de Oualata peut susciter des interrogations de l’opinion publique et des observateurs sur le bien fondé de sa démarche actuelle. C’est évidemment l’écart de langage qui est mis en cause mais pas la justesse de la cause car les criminels qu'importe leur couleur de peau ou de religion ou de leur appartenance ethnique doivent être toujours jugés non seulement pour que la justice soit faite mais aussi pour qu’aucune violation des droits de l’homme ne soit toléré.


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