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jeudi 1 mars 2012

Essirage s’entretien avec Biram Ould Abeid , Président de l’organisation IRA-Mauritanie



altEssirage.net : Monsieur Biram Dah Abeid, vous êtes à la tête d’une organisation de défense des droits de l’homme. L’IRA a été créée pour la résurgence du mouvement abolitionniste. Mais on vous voit sur tous les fronts. Votre discours est teinté de politique puisque vous attaquez très souvent le régime incarné par Mohammed Ould Abdel Aziz. Votre organisation est-elle plus politique qu’humanitaire ?

Biram Dah Abeid
: Moi je ne vois pas quel genre d’interdit, dans une démocratie, un  État de droit, frapperait un défenseur des droits  humains en lui ôtant la faculté d’exprimer des opinons tranchés, voire partisanes, sur des questions d’intérêt public. Ce cloisonnement thématique, largement admis comme une évidence, aboutit à la distinction de la politique, comme un métier à part, d’ailleurs réservé à ses praticiens. Or, le postulat ne repose sur aucun fondement légal ni même empirique si nous devions nous référer à l’usage dans les Nations libres, communément nommées Occident, elles qui ont développé les formes les plus abouties de la citoyenneté. Un militant des droits de l’Homme doit se mêler de la gestion du pouvoir de l’Etat ; dans un pays, comme la Mauritanie, où les injustices sont la norme, l’apolitisme relèverait d’une forme de névrose à mi-chemin de la cécité volontaire
En réalité de telles assertions sortent des esprits tarés, de certaines catégories de mes compatriotes incultes, notamment parmi les partisans du pouvoir mauritanien, depuis le Colonel Ould Taya au général prématuré Ould Abdel Aziz. La formulation de cette incompatibilité prétendue résulte de la volonté de tenir la société civile à l’écart de l’exercice et de la régulation de l’autorité suprême. La séparation politique/droits de l’Homme est une supercherie du système et je la déclare caduque, désormais.
Il est tout de même constant et remarquable que Mohamed Ould Abdel Aziz politise lui-même le sujet : ainsi, quant une Ong, un mouvement social ou un groupe d’études lui semble trop critique, il n’hésite pas à la priver de reconnaissance. Les exemples de ne maquent pas de l’Ira, à Conscience et Résistance, Deckalem, etc. Même le Centre 4 S du diplomate international Ahmedou Ould Abdallah doit tenir ses travaux hors de Mauritanie, comme s’il s’agissait d’une école de la subversion !!!
Parfois, cet aspect de la censure prend une tournure assez désopilante : voyez-vous, le Général Aziz a résolu de recevoir, en pompe et officiellement, les fameux dissidents de l’Ira ; en réalité, il s’agit de la bonne vielle méthode des services de sécurité du tiers-monde qui consiste à repérer des éléments fragiles chez l’adversaire, les placer en orbite, avant de les exploiter à une mission classique de renseignement. Une fois qu’ils sont grillés ou perdent de leur rendement, l’industrie du faux leur réserve un traitement ultime dans un autre atelier de recyclage d’où ils ressortent, avec l’habit flamboyant du traitre qui s’assume mais sous une nouvelle dénomination ; il se présente alors comme le repenti, sauvé de la secte extrémiste et prêt à tendre la main aux puissants du moment pour « une démarche constructive », etc. Généralement, ce genre de personnes sombre dans l’anonymat, au bout de leur premier semestre d’exercice. Ils finissent agents subalternes en queue de peloton des indicateurs placés sur la voie publique. Espionner les vendeuses de couscous et les charretiers devient leur espoir exorbitant de promotion.
Dans le cas d’espèce, Oud Abdel Aziz les a reçus, comme transfuges de l’Ira, une organisation pourtant non reconnue ; la rencontre a été diffusée par les média officiels. En toute logique, l’Ira devrait bénéficier de son récépissé d’Ong !


Essirage.net : Récemment votre organisation a exclu  Alhoussein Dieng et Saleck Ould Inalla pour collaboration indigne avec les autorités et les services de renseignement. Lors d’une conférence de presse Dieng  vous reproche notamment une gestion personnalisée et dictatoriale du mouvement et un manque de transparence. Est-ce que cette sortie  ne va pas affecter la crédibilité du  mouvement ?


Biram Dah Abeid :
L’agissement du général Ould Abdel Aziz avec cette marionnette, est insignifiant pour pouvoir porter préjudice à l’IRA. Parce que le chef de l’Etat lui-même, le Général Aziz et ses laudateurs parmi les ministres, parmi les pseudos oulémas, parmi les thuriféraires de tous genres ont tous fait à l’intérieur et à l’extérieur pour discréditer IRA. Ce ne n’est pas Dieng, qui va leur réaliser ce qu’ils ont tous échoué à atteindre. Nous somme le désespoir de Aziz parce que sa conformation mentale ne lui permet pas de comprendre où nous voulons en venir : L’élargissement de ce mouvement  populaire de défense des droits de l’homme correspond à une profonde demande de révolution intellectuelle, morale, sociale et religieuse dans un environnement jusqu’ici hermétiques aux convulsions de l’Histoire. Aziz n’a pas lu les commentateurs de Hegel parmi lesquels l’on ne retrouve, il est vrai aucun militaire et pas un seul mécanicien.

Pour revenir à votre question factuelle, ce membre faisandé a été exclu, quatre jours avant l’audience avec le Général, en date du 12 février. Parce que nous avons constaté que Aziz s’est rabattu sur lui, nous l’avons appelé et lui ont signifié son congédiement, au terme d’une réunion. Le pauvre s’est refugié chez Aziz et ce dernier s’est jeté sur lui comme le fauve affamé sur une charogne. Cela ne peut en rien importuner IRA ni la gêner.  La preuve c’est que le 26 février, notre point de presse s’est transformé en  meeting où des centaines de militants venus de la périphérie de Nouakchott témoignèrent de leur engagement indéfectible dans l’Ira.

Essirage.net : Quelles sont les relations que vous entretenez avec Limam chavi, et les organisations telles que les FLAM ? et comptez vous sur ces relations pour faire chuter le pouvoir de Ould Abdel Aziz ?


Birame Ould Abeid :
Mes relations avec Moustapha Limam Chavii et Samba Thiam, président des Flam, ainsi que mes liens avec d’autres illustres mauritaniens, sont empreintes de respect et de solidarité militante. Nous discutons entre hommes libres et dignes, qui refusent la corruption, qui refusent la capitulation, qui refusent de plier l’échine devant le système militaire esclavagiste et raciste en Mauritanie et acceptent de défier la dictature du Général Mohamed Ould Abdel Aziz. Et notre serment entre nous est de mener un combat avec noblesse, non-violence et détermination, pour mettre fin au pouvoir militaire coupable  d’exaction, de racisme, de tentative de génocide, de tribalisme, de gabegie, d’esclavage et d’exclusion. Et je suis fier de travailler avec cette catégorie de mes concitoyens.

Essirage.net :.Parlons de IRA et de Touche Pas à Ma Nationalité y a t-il une coordination entre les deux leaders à savoir Monsieur Biram  Dah Abeid et Abdoul Birane wane?


Biram Dah Abeid :
Non je ne connais pas personnellement Wane, je le connais de loin.  Nous ne nous connaissons pas personnellement.

Essirage.net : Ou en êtes vous avec le projet de CNT dont vous avez lancé l’idée il y a un mois ?


Biram Ould Abeid :
C’est une idée qui fait son chemin, parmi l’ensemble de nos partenaires, dans l’opposition et la société civile. Il convient de noter que le concept n’est pas la propriété de l’Ira ; c’est un projet alternatif et interactif qui s’inspire des expériences révolutionnaires du Printemps arabe. Nous nous employons ainsi à préparer l’alternance par la participation populaire afin d’exercer un contrôle, a priori, sur les auteurs d’une éventuelle transition. En somme, nous cherchons à éviter d’être pris de court par un changement soudain de pouvoir. Le Cnt est une démarche préventive à la confiscation du mécontentement des masses.

Essirage.net : A propos de savants, avez-vous cherché à entrer en contact avec certains pour expliquer les causes que vous défendez?


Biram Dah Abeid :
Je pense que c’est à ces gens que vous appelez Savants, c’est à eux de venir nous approcher, proposer et accepter de se repentir. C’est à eux de venir demander pardon à la communauté Hratine. Car ils ont légitimés depuis des siècles, jusqu’à nos jours, le calvaire de générations de nos ascendants, exploités, humiliés, battus parfois vendus et traités comme du bétail de trait. Donc nous nous attendons que ces Oulémas, que vous appelé savants,  ces oulémas du pouvoir, ces thuriféraires de l’esclavage, du système esclavagiste, ces thuriféraires des différents pouvoirs  dictatoriaux, de demander pardon aux mauritaniens, de demander pardon aux Hratines et de revenir à la vraie foi, la foi islamique qu’ils n’ont jamais eue malgré leurs connaissance, toujours mises au profit de Satan, des plus fort, des dominants, des esclavagistes. Donc leur Islam, est un Islam négrier, comme à Zanzibar du temps des comptoirs omanais. Leur religion à eux favorise l’appât du gain, la résignation devant la force et tourne le dos aux faibles.

Essirage.net: dans une conférence de presse dimanche vous avez demandé à Aqmi de vous accorder le temps de vous débarrasser de Mohamed Ould Abdel Aziz afin de permettre la libération du gendarme Ely Ould Mokhtar. Faut-il penser que vous avez été mandaté par une autre force ou faut-il considérer que vous poussez un peu trop fort?


Biram Dah Abeid
: Personne ne peut mander Biram. Parce que Biram est un homme libre. Moi, mes paroles, je les transforme en actes. Je ne parle pas dans le vide. Personne ne peut me mander. Seules me guident ma conscience et mes convictions. Et c’est mon amour de ma patrie, mon amour de l’être humain, mon amour du temps d’ici-bas, de la temporalité humaine qui me détermine en l’occurrence.  L’existence de l’autre et l’intégrité du corps sont des valeurs sacrées à mes yeux; pour moi, Ely Ould Moctar incarne une vie, singulière, unique et précieuse en soi.
Mon devoir est de faire ce que j’ai fait. Ce que j’ai fait c’est de me soucier de la survie de cet homme, aujourd’hui en danger. Et je veux appeler AQMI à la raison. Je les appelle à la raison par la voix publique, par voie de presse mais aussi par d’autres média. J’appelle les gens d’AQMI à la raison humaine, à la raison islamique ; j’entends leur dire de ne pas compter sur Ould Abdel Aziz pour  qu’il joue franc jeu et contribue à sauver des otages. Ould Abdel Aziz a déjà laissé mourir des soldats, des taupes ; de pauvres mauritaniens et maliens qu’il a infiltrés dans AQMi ont été dénoncés depuis le siège de la Direction Générale de la Sûreté Nationale (DGSN) à Nouakchott et exécutés par dizaines, dans l’indifférence totale. J’ai pu voir les vidéos insupportables des aveux et de l’exécution.  Je veux qu’AQMI parle au peuple mauritanien, responsabilise le peuple mauritanien au lieu de responsabiliser Ould Abdel Aziz. Je demande au peuple mauritanien de presser le pas pour débarrasser la Mauritanie de Aziz. Si l’on débarrasse la Mauritanie de Aziz la guerre contre AQMI s’estompera.
Moi je souhaite d’abord qu’AQMI accorde un délai aux mauritaniens, pour que nous puissions nous débarrasser du général Aziz et retirer nos troupes du territoire malien, là où est menée une guerre par procuration.
Il y lieu de le rappeler,  ce sont des mauritaniens et des maliens civils et militaires qui sont sacrifiés. C’est une expédition enclenchée par Aziz pour amener certaines puissances occidentales à l’appuyer contre la volonté des mauritaniens ; mais elle n’a servi à rien, au contraire elle a permis à AQMI de se consolider en prélevant des armes et munitions sur nos troupes, avant le pillage des arsenaux libyens.
Je veux que tout le monde sache que, malgré le verrouillage des frontières, donc 45 points de passage, contrôlés et quadrillés, par l’armée, trois véhicules d’AQMI sont entrées en février 2011 par Sélibaby et traversé cinq régions avant d’exploser à la porte sud de Nouakchott ; si l’objectif était l’une de ces région traversées, rien ne les aurait empêché de porter des coups meurtriers ; juillet 2011, Basiknou est attaquée, décembre suivant, un gendarme en faction est kidnappé en pleine caserne sur le territoire mauritanien ; je peux encore énumérer la liste des échecs et revers patents de ce régime dans sa prétendue mobilisation contre AQMI.

Essirage.net: votre dernier mot


Biram Dah Abeid :
Je lance un appel, encore une fois, aux dirigeants d’AQMI pour qu’ils reviennent à la raison et ne considèrent pas Aziz porte-parole des mauritaniens. Aziz est le moteur de ses propres instincts, de sa soif de pouvoir et d’argent, d’une ambition démesurée d’accumuler des biens très vite. Nous les mauritaniens nous seront bientôt les porte-paroles de nous-mêmes. Et en ce moment, nous  n’accepterons pas d’être le bras séculier du monde pour mener la guerre contre AQMI. Autant les autres pays se sont abstenus de jeter leurs troupes dans cette entreprise, a fortiori nous autres devrions nous en abstenir.
Je voudrais lancer un message à la communauté internationale pour faire pression sur Aziz afin qu’il dévoile le lieu de détention de nos anciens compagnons de cellule, les salafistes de Mauritanie ; ils ont été transportés dans un lieu inconnu. L’on ignore s’ils sont morts ou survivent quelque part, livrés à un autre Etat.  Et je le dis, ici, clairement : malgré mon désaccord radical avec eux et mon rejet absolu de leurs méthodes et vision du monde, ma solidarité avec les détenus salafistes continue tant qu’ils ne bénéficient des droits des prisonniers, selon les lois et conventions internationales.

Entretien réalisé par Oumar Amadou M’baye
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