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jeudi 14 juillet 2011

Identification des sépultures: Relents d’amalgame, dans le passif humanitaire?

Identification des sépultures: Relents d’amalgame, dans le passif humanitaire?
En panne depuis l’indemnisation des ayant-droits des militaires négro-mauritaniens assassinés, entre 89 et 92, le processus de règlement du passif humanitaire semble connaître une petite évolution, depuis la décision de Biram Ould Abeid, président de l’IRA, de célébrer, à Inal, l’anniversaire des soldats négro-africains, exécutés par leurs frères d’armes maures. Pour couper l’herbe sous les pieds du combattant pour l’égalité et la justice, le président de la République a pris la décision de faire identifier l’ensemble des sépultures des personnes décédées depuis 1960, ce qui inclut ceux qui ont pris, ou été accusés de vouloir prendre, les armes contre le régime d’Ould Taya. On y retrouve d’authentiques innocents, des auteurs de tentatives de coup d’Etat, en 1981 ou 1987, des amis de Saleh Ould Hannena et des subversifs de tout acabit. Un vrai fourre-tout. A l’évidence, le pouvoir, acculé par des extrémistes farouchement opposés au règlement définitif du douloureux dossier – ils sentent bien, les bougres, qu’une justice bien ordonnée les viserait, immanquablement – le pouvoir semble jouer sur le registre de l’amalgame, pour gagner du temps. Mais jusqu’à quand?
Par sa courageuse décision, Biram Ould Dah Ould Abeid a donné un coup d’accélérateur au dossier. Le pouvoir a-t-il trouvé la parade, pour, d’une part, continuer à protéger les bourreaux, civils et militaires, qui se promènent, tout à leur aise, dans la République, occupant, même, de hautes fonctions politiques, électives ou sécuritaires, et, d’autre part, calmer la grogne des victimes? Au sein de certaines organisations de défenses des droits des militaires assassinés ou rescapés mais révoqués sans droits, on assiste à une querelle de chapelles, des divergences sont apparues, entre le «Monsieur passif humanitaire» du pouvoir, le colonel Dia Adama, et certains membres de COVIRE, quant au recensement des victimes et des ayant-droits. La pomme de discorde proviendrait de ce que la Grande muette, qui détient, en principe, tous les dossiers des militaires – tués, déserteurs ou autres – du grand Nord saharien aux rives du fleuve, n’aurait pas livré, aux organisations de défense des droits de l’Homme, notamment le COVIRE, la réalité des faits, tandis que le «Monsieur passif humanitaire» se refusait à prendre en compte les chiffres du recensement du COVIRE. Cette dernière organisation était, jusqu’à présent, la principale interlocutrice du général Ould Abdel Aziz, avant et au lendemain de sa prise de pouvoir et de la Prière aux morts de Kaédi.
Parmi les doléances de cette organisation, le général avait retenu, pour commencer, les réparations aux ayant-droits. Ainsi, outre un terrain à usage d’habitation, chaque officier lésé, ou ses ayant-droits, devait recevoir deux millions d’ouguiyas; chaque sous-officier, 1,8 million et chaque soldat, 1,6 million. Des réparations qui ont suscité de nombreux remous, avant de conduire à une scission, au sein des ayant-droits dont certains se sont sentis floués. En dépit du blocage du processus – certains ayant-droits, 52 familles, selon nos sources, attendent toujours d’être indemnisés – l’anniversaire de la Prière de l’absent de Kaédi a été fêtée, avec une satisfaction mitigée.

Diversion

La décision d’Ould Abdel Aziz de mettre, dans le même panier, ceux qui ont été exécutés, froidement, dans les casernes, en mission commandée, ou dans la vallée, lors des évènements de 1989-92, et ceux qui ont pris les armes contre le pouvoir en place, relève de la diversion. Mais le dossier, trop sérieux pour qu’on se satisfasse de telles filouteries, semble bel et bien se corser, alors qu’il pouvait être en voie de règlement. Nombre d’observateurs se demandent à quelle commission le pouvoir va-t-il confier la gestion de l’identification des sépultures. Qui va y siéger? Qui pourra la saisir? Quelle sera la durée de son mandat? Des questions que pose le député Moustapha Ould Abdeiderrahmane, président du Renouveau Démocratique (RD), dans une récente interview accordée au quotidien Biladi. Pour le président du RD, le pouvoir, si tant est qu’il est déterminé à régler, définitivement, ce dossier en vue de consolider l’unité nationale, doit, surtout, s’abstenir de le politiser. Pour panser les plaies, estime Ould Abeiderrahamane, il faudrait connaître la vérité, situer, donc, les responsabilités, avant de passer, éventuellement, au pardon. Le président du RD souhaite que la commission qui sera mise sur pied s’inspire des expériences Sud-africaine et marocaine.
Lors d’une récente manifestation, le FONADH a estimé qu’il ne peut y avoir de réparation ou de pardon sans justice. Pour cette organisation qui se bat, depuis les années de braise, il faut que la lumière soit faite, sans passion, sur cette page douloureuse de notre histoire contemporaine, afin de parvenir à la paix des coeurs. Cela suppose la levée rapide de la loi d’amnistie, votée en 1992-93, en catimini, par une Assemblée nationale dominée, à l’époque par le PRDS. Pour rappel, les organisations humanitaires de défenses des victimes avaient saisi, au lendemain du vote de cette loi inique, la justice internationale. Accusés, par les organisations des droits humains, d’être mêlés aux exécutions extrajudiciaires, certains officiers de l’armée, alors en stage à l’étranger, avaient pris la fuite, pour échapper à des arrestations hors du sol national. A l’époque, l’interpellation, en France, d’Ely Ould Dah avait défrayé la chronique, avant d’être étouffée dans l’œuf, avec la complicité du gouvernement français.

Dalay Lam

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